Aurélien Tchouaméni (AS Monaco).
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Monaco : Aurélien Tchouaméni, le nouveau prince du Rocher

Monaco : Aurélien Tchouaméni, le nouveau prince du Rocher

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Publié le 06/09 à 13:25 - NM

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Élément incontournable de l’AS Monaco de Niko Kovac et rayon de soleil de la dernière liste de Didier Deschamps, Aurélien Tchouaméni n’en finit plus d’éclabousser le paysage footballistique français de son talent. Du haut de ses 21 ans, il a tout d’un futur grand.

Il est celui dont on ne cesse de parler à Monaco. Appelé pour la première fois en équipe de France par Didier Deschamps, le 26 août dernier, et honoré de ses deux premières sélections face à la Bosnie-Herzégovine (1-1) mercredi et face à l’Ukraine (1-1) samedi, Aurélien Tchouaméni n’en finit plus de crever l’écran ces dernières semaines. Une progression dans la lignée de sa saison passée qu’il doit en grande partie à son talent mais également à l’arrivée de Niko Kovac en Principauté. Car, recruté avec un statut de joueur très prometteur par l’AS Monaco aux Girondins de Bordeaux en janvier 2020, le natif de Rouen a mis du temps à prendre ses marques et s’imposer dans l’effectif monégasque. Pas aidé par une première apparition manquée, à Nîmes (1er février 2020), sous les ordres de Roberto Moreno, le milieu de terrain ne connaîtra pas un début d’histoire idyllique. Par la suite entré en jeu à seulement deux reprises avant l’arrêt prématuré du championnat, il vivait alors le premier moment de doute de sa jeune carrière.

Un passage délicat sur lequel il était revenu sans détour et de manière réfléchie dans les colonnes de l’Equipe. « C'est difficile d'entrer dans des matchs comme ça. En plus, avec le foot de maintenant, les médias et les réseaux sociaux, tu n'as pas le temps. Si tu n'es pas prêt direct, les gens vont te le faire comprendre. (..) Il y a vingt ans, quand les joueurs rentraient chez eux, ils ne voyaient pas sur les réseaux sociaux 150 commentaires de personnes qui parlaient de ta performance. » Mais heureusement pour lui, Niko Kovac va s’installer sur le banc de l’ASM en juillet 2020. Les cartes vont être rabattues et son horizon va s’éclaircir. Installé aux côtés de son ami Youssouf Fofana, également recruté en janvier 2020, dans un double pivot, le fan de Paul Pogba et Kevin De Bruyne va rapidement sortir la tête de l’eau grâce à sa puissance, son activité et sa capacité à construire le jeu. Enfin installé dans le onze de départ, le Franco-Camerounais de 21 ans va prendre de l’épaisseur jusqu’à devenir la première rampe de lancement de son équipe.

Une machine à la récupération

« Aurélien progresse vraiment bien match après match, il a monté le niveau, soulignait Niko Kovac en mars dernier. Il comprend parfaitement ce qu’on lui demande et respecte ce qu’il doit faire. Cela prouve que lorsque vous travaillez dur, vous pouvez atteindre vos objectifs de carrière. » Une progression qu’avait analysée son ancien coéquipier au centre de formation des Girondins de Bordeaux, Jules Koundé, dans France Football. « Je trouve qu'il a vraiment passé un cap dans l'utilisation du ballon. Il a toujours été très intense, avec un gros volume de jeu, c'est la base de son jeu, il récupère un nombre incalculable de ballons et fait énormément de courses, expliquait l’actuel joueur de Séville. Je trouve qu'il s'est aussi amélioré dans sa dépense d'énergie, il court plus intelligemment. Il se place beaucoup mieux pour recevoir le ballon et c'est aussi mieux dans ce qu'il fait du ballon. Il a progressé sur ça, sur le fait d'être plus vertical, de faire des passes, pas risquées, mais un peu plus intéressantes pour aider son équipe à aller de l'avant. »

Des propos parfaitement illustrés par différentes statistiques à l’issue de la saison 2020/21, puisque Tchouaméni, titulaire à 36 reprises, a été le deuxième joueur à réussir le plus de tacles (68) en Ligue 1 Uber Eats. Le milieu de terrain s’est également distingué en étant le 2e meilleur récupérateur (257) ainsi que le 2e joueur à remporter le plus de duels (292). Si Niko Kovac a, certes, eu un rôle prépondérant dans cette évolution, son père Fernand, suiveur assidu de la carrière de son fils, n’en est également pas étranger. « Je trouvais qu'il avait été très en dedans entre septembre et octobre, qu'il se contentait du minimum. Pendant les fêtes, je l'ai invité à passer deux heures avec moi, en tête-à-tête. Je lui ai dit que je ne le reconnaissais pas et qu'il était devenu un joueur banal. Il me le reproche encore en ce moment en me disant : « Voilà le joueur banal. » Je trouvais que ses efforts ne se voyaient pas. En sortie de cet entretien, il m'a dit : « Tu vas voir. » », expliquait le paternel pour France Football.

Joyau du centre de formation des Girondins

Des mots qui ont, à n’en pas douter, contribué au fait qu’Aurélien Tchouaméni, désormais accompagné par un psychologue, un kiné, un ostéopathe, un préparateur physique, un chef cuisinier et même un diététicien, ait tout explosé sur son passage et se soit vu récompenser du Trophée UNFP du Meilleur Espoir de Ligue 1 Uber Eats la saison passée. Mais avant tout cela, c’est avec les Girondins de Bordeaux qu’il avait paraphé son premier contrat professionnel en 2017, à l’âge de 17 ans, quelques mois avant d’obtenir son bac S. Au sein du club au Scapulaire, il est très vite considéré comme le joueur à suivre parmi la génération des Jules Koundé, Zaydou Youssouf ou encore Yassine Benrahou. Il faut dire que très tôt les Girondins s’étaient intéressés à celui qui évoluait au poste d’avant-centre, alors qu’il avait tout juste sept-huit ans et portait les couleurs d’Artigues, mais ils avaient dû patienter avant de le récupérer.

Son père, directeur d'une usine de production de vaccins, et sa mère, conseillère principale d'éducation (CPE), ne voulaient pas que leur prodige grille les étapes. « C’était compliqué d’aller et venir entre Artigues et Le Haillan. Mes parents ont préféré que je reste dans mon club. Je n’ai intégré les Girondins qu’à 12 ans. » Lancé dans le grand bain avec Bordeaux le 26 juillet 2018 face au FK Ventspils, en deuxième tour de qualification de la Ligue Europa, par Gustavo Poyet, le champion de France U19 en 2019 enchaîne les titularisations lors de la phase de qualification et inscrit son premier but en pro le 9 août suivant, lors du troisième tour de qualification. Pour clore en apothéose cette folle semaine, il connaît sa première apparition en Ligue 1 Uber Eats trois jours plus tard, face au RC Strasbourg Alsace, où il est titularisé aux côtés de Lukas Lerager et Jaroslav Plasil. Son aventure dans l’élite est lancée, mais elle va être rapidement freinée. La raison ? Gustavo Poyet, qui prédisait « un futur extraordinaire » au pur produit du FCGB, était évincé et remplacé par Éric Bedouet.

Abonné aux convocations chez les jeunes

A partir de là, le milieu retourne un peu aux oubliettes, entre passages en sélection et blessures, dont une fracture du péroné en mars 2019. Au total, il participe à dix rencontres de Ligue 1 Uber Eats pour sa première saison en pro. C’est lors de l’exercice suivant qu’il va mettre en lumière le potentiel décrit par tous au Haillan, sous la houlette de Paulo Sousa. Très bon en duo avec le Brésilien Otávio au cœur du 3-4-3 flexible du technicien portugais, Tchouaméni devient indiscutable à 19 printemps. « Le coach a été un grand joueur. Il m’a un peu pris sous son aile, oui, peut-être aussi en raison de mon âge, expliquait à l’époque le numéro 17 du FCGB dans l’Equipe. Il est extrêmement exigeant, refuse qu’on se relâche aux entraînements et en match. Et sur le placement, il est très, très pointilleux.» Une exigence qui va permettre à ce grand chambreur mais aussi mauvais joueur d’éclore à vitesse grand V avant de s’envoler en direction de l’AS Monaco.

Reflet de son parcours en club, son histoire en sélection s’est également construite pas à pas. Abonné aux convocations avec les Bleus, celui qui doit encore travailler sa capacité à se projeter dans la surface adverse évolue successivement chez les U16 (11 matchs), U17 (14 matchs), U18 (11 matchs), U19 (7 matchs), U20 (5 matchs) avant de découvrir l'équipe de France Espoirs pour disputer l'Euro 2021 (4 matchs). Cette arrivée en équipe de France n’est donc qu’une récompense logique, et son entraîneur Niko Kovac l’avait vue venir le 16 août dernier. « S’il continue à travailler, s’il écoute attentivement, il ira certainement en équipe de France A, un jour. Je sais qu’il est intelligent et qu’il sait ce qu’il faut faire pour y arriver. Il travaille beaucoup tous les jours, sur le terrain et en dehors, notamment individuellement en regardant des vidéos. » Entré à la pause face à la Bosnie-Herzégovine (1-1) puis titularisé en Ukraine (1-1), le numéro 8 de l’ASM a été la seule éclaircie dans la grisaille bleue et pourrait enchaîner ce mardi une troisième sélection face à la Finlande au Groupama Stadium. Le « joueur banal » est-il en train de devenir singulier ?