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Reims, la vision étrangère

Reims, la vision étrangère

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Publié le 16/07 à 12:04 - LFP

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Le Stade de Reims se révèle particulièrement ouvert au-delà de l’Hexagone pour effectuer son mercato avec cet été 4 nouveaux joueurs venus de l’étranger. Une spécialité pour le club.

En novembre 2015 alors que le club pointait dans la dernière partie du classement de Ligue 1 Uber Eats, le Stade de Reims présentait son projet, baptisé « Horizon 2020 », destiné à fixer les objectifs de développement du club champenois. Cinq ans plus tard, malgré une descente en Ligue 2 BKT pendant deux saisons entre 2016 et 2018, le club du président Jean-Pierre Caillot a fait mieux que maintenir le cap. Et ce, d’abord sportivement. Soucieux de s’installer durablement dans le Top 10 du championnat, le SdR a bouclé les deux derniers exercices aux 8e et 6e places. « Cela fait près de 50 ans que le Stade de Reims n’avait pas terminé aussi bien dans un championnat de Ligue 1 Uber Eats », rappelait le président Caillot en mai 2019.

Une réussite en partie obtenue grâce à la qualité du recrutement effectué, notamment en dehors de nos frontières. « On a une cellule de recrutement qui travaille énormément, qui se déplace beaucoup à l'étranger. Il faut aller chercher les pépites dans d'autres championnats », indiquait le président rémois en fin de saison 2018/19.

Un recrutement international

Il y a sept ans, l’équipe alors coachée par Hubert Fournier comptait dans ses rangs Atila Turan, venu du Sporting (Portugal), Mads Albaek (Danemark) et Eliran Atar (Israël). Des profils qui n’ont pas rencontré le succès de leurs successeurs au club, mais qui ont marqué une nouvelle orientation. « Il n’est jamais évident de trouver les profils recherchés sur un marché français fermé qui voit les mêmes équipes cibler les mêmes joueurs, ce qui entraîne automatiquement une hausse démesurée des tarifs », expliquait Jean-Pierre Caillot en 2013. Ensuite, le club avait fait venir « dans la précipitation » de l’étranger les Roberge, Bifouma et El Kaoutari.

Désormais, le maître-mot est anticipation pour des mercatos à la fois préparés et ambitieux. Une tendance qui s’est bien développée au sein d’un club mieux ancré en Ligue 1 Uber Eats. En février 2019, alors que Reims venait à peine de retrouver l'élite, Jean-Pierre Caillot avait évoqué la stratégie lors des période de transferts : « Le Stade de Reims a souhaité recruter des joueurs confirmés, mais dont la popularité en France restait limitée (…) Un travail de fond est réalisé tout au long de l’année. Pour l’été dernier (18/19), plus d’un millier de joueurs ont été ciblés, 153 propositions de projets et discussions à des joueurs. Finalement, on s’est arrêté au recrutement de 9 joueurs ». 

« Le staff nous a transmis ses exigences en matière de recrutement. Nous sommes allés à l’étranger, on savait qu’un certain nombre de profils ciblés par notre staff étaient trop chers sur le marché français, ou moins accessibles ou qu’ils ne seraient pas venus chez un promu. On est partis avec notre bâton de pèlerin au Portugal, en Belgique par exemple, pour essayer de convaincre des agents ou des joueurs qu’on avait ciblés qu’il y avait un vrai projet au Stade de Reims. On a passé trois mois d’été à recevoir une multitude de joueurs qui étaient ciblés pour leur présenter notre projet, notre ville. Quand vous attirez des internationaux belges, des espoirs anglais ça ne se fait pas comme ça », expliquait le président rémois à Footmercato (septembre 2018).

Ainsi, dans l’équipe qui a clos la saison 2019/2020, Moussa Doumbia a été déniché libre en Russie, Ghislain Konan et Moreto Cassama au Portugal, Thomas Foket en Belgique, Marshall Munetsi en Afrique du Sud, Dario Maresic en Autriche, Dereck Kutesa en Suisse, Arber Zeneli et Kaj Sierhuis aux Pays-Bas, mais aussi les revenants Alaixys Romao en Grèce et Anastasios Donis en Allemagne. Quand par le passé, le SdR avait déjà également rapatrié Hamari Traoré de Belgique (Lierse), Chris Mavinga de Russie (Kazan) et repéré Björn Engels en Grèce (Olympiakos)… De quoi d’un côté aidet le Stade de Reims à poursuivre son ascension et de l’autre permettre à des joueurs de profiter de ce passage en Champagne comme d’un tremplin.

Le SdR a le flair

Les deux derniers gardiens titulaires sont de beaux exemples de cette réussite. Formé au HAC comme les Mandanda, Douchez et Revault, Edouard Mendy n’y a jamais joué et a été repéré au sein de la réserve de l’OM. A Reims, où il a préféré signer à 24 ans son premier contrat pro malgré une proposition du club phocéen, il est arrivé comme doublure de Johann Carrasso avant de s’imposer. Une éclosion qui l’a conduit à quitter la Champagne pour la Bretagne à l’été 2019. Comme beaucoup d’autres recrues rémoises, le départ d’Edouard Mendy après 32 clean sheets en 84 rencontres a été bien plus remarqué que son arrivée discrète en juin 2016.

Son successeur a lui débarqué d’Israël, prouvant une fois nouvelle fois l’aptitude rémoise à dénicher des talents un peu partout. Même si Predrag Rajkovic était aussi convoité par Montpellier, déjà international serbe (11 sélections) et titré (champion du monde U20), sa venue n’était pas forcément assurée de succès comme l’a rappelé Jean-Pierre Caillot dans But! : « C’est encore une pioche magnifique signée de notre cellule de recrutement. Pour beaucoup de supporters et d’observateurs, Predrag a été une grande découverte cette saison. »

A l’image d’un Rajkovic, le club rémois ne se limite donc pas à faire percer des talents maison, comme Aïssa Mandi, Jordan Siebatcheu, Rémy Oudin voire Nathanaël Mbuku en attendant ceux des pépites Sambou Sissoko, Moustapha Mbow ou encore Isaac Solet, ou à trouver son bonheur ailleurs dans l’Hexagone ; comme il l’a fait avec Edouard Mendy mais aussi par exemple avec Odaïr Fortes (US Alfortville), Nicolas de Préville (FC Istres), Hassane Kamara (Châteauroux), Anthony Weber (Paris FC), Boulaye Dia (Jura Sud), Tristan Dingomé (Troyes) ou encore Axel Disasi, arrivé libre en 2016.

Touré, la pépite de la saison passée

Le Stade de Reims se révèle particulièrement performant dans la détection de talents étrangers et n’hésite pas à avaler les kilomètres pour effectuer son recrutement dans des championnats moins huppés.

« On ne se fixe ni de limites ni de frontières. On essaie de sortir du marché français », expliquait encore Mathieu Lacour, le Directeur Général du club à Footmercato.net. « Il y a certains types de joueurs qu’on ne trouve pas dans le marché français. Ou alors qui, pour la même qualité, ne vont pas être accessibles pour nous. Par exemple, pour moi, Zeneli, avec ces mêmes stats dans le marché français c’est juste 10 M€. Alors que nous l’avons acheté pour 3,5 M€ avec des bonus ». Et pour trouver un Zeneli à Heerenveen, « on suit le championnat d’Eredivisie pour le recrutement, notamment pour le secteur offensif où les clubs font souvent du travail intéressant », déclarait David Guion dans Breaking Sport lors de l’arrivée du Kosovar, au mercato d’hiver 2019.

Même travail pour El Bilal Touré, attaquant de 18 ans révélé la saison écoulée, qui a été recruté au Mali, après avoir remporté la CAN U20. Repéré par Yannick Menu, arrivé de Monaco pour prendre la direction du centre de formation rémois, Touré n’a eu besoin que de quelques minutes pour convaincre. « On voyait qu'il avait quelque chose de différent. Ces tests athlétiques se sont révélés très intéressants. Sur le plan technique, il confirmait, sur les déplacements... On a terminé par un match de préparation, il a marqué un but, a fait une passe décisive », racontait dans France Football Franck Chalençon, le coach de l’équipe B. Avec le départ d’Oudin, les blessures de Zeneli et de Dia, le jeune attaquant a avancé de six mois son intégration à l’équipe première. De quoi lui permettre de s’offrir un record de précocité au club : plus jeune buteur en Ligue 1 Uber Eats sur les 50 dernières saisons (18 ans et 121 jours).

Berisha, une recrue dans l’esprit rémois

Cet été, comme à chaque fois ces dernières saisons, le SdR s’est rapidement activé pour signer ses recrues. Et les arrivées à fort potentiel sont encore venues de tous les horizons : d’Angleterre (l’attaquant Hornby), de Belgique (les défenseurs Faes et De Smet) et d’Italie (le milieu Berisha). D’improbables retrouvailles ont même lieu avec celles entre Arber Zeneli et Wout Faes, passés par Heerenveen (P-B). Un travail à l’international qui permet aussi à Reims d’acquérir une nouvelle renommée. « Reims, ça parle en Belgique. On suit de plus en plus le club à travers ses résultats et parce qu’il y a eu des joueurs connus comme Björn Engels qui a fait une étape magnifique ici », a raconté Faes sur le site du club.

Un travail de fond payant mis en perspective par les propos de Jean-Pierre Caillot en 2018. « Même si tous les amoureux du football français savent ce qu’a pu représenter le Stade de Reims dans le passé, quand vous êtes Liverpool et qu’on vous apprend que Reims s’intéresse à un de vos joueurs (Ojo venu en prêt)... Vous vous demandez si ce ne sont pas des fous qui vous contactent. Et quand ils voient comment vous travaillez ils commencent à vous prendre au sérieux ».

Et la dernière arrivée de Valon Berisha est aussi le fruit d’un savoir-faire rémois : « Je pense que c’est une belle prise. C’est un joueur que l’on suit depuis plus de deux ans, dans son club la Lazio Rome en en sélection du Kosovo. On a beaucoup travaillé sur son dossier, conservant des liens étroits avec lui. Il faut beaucoup de travail, de la patience, et un peu de chance. S’il est chez nous aujourd’hui, c’est qu’avec lui, on cochait toutes les cases », a indiqué le président Caillot à l’Union.

De quoi lancer « Ambitions 2024 », le prochain projet du club sur lequel est dernièrement revenu le président Caillot pour RMC Sport : « Par principe, lorsque vous atteignez vos objectifs (Horizon 2020), il faut s’en créer d’autres. La nouvelle feuille de route du Stade de Reims s’appelle Ambitions 2024. Concrètement, notre objectif est de rester dans le Top 5 français en termes d’organisation. » Sans doute en conservant la même stratégie en matière de recrutement.