Bilan

Comment Philippe Clement a replacé Monaco sur le podium ?

Comment Philippe Clement a replacé Monaco sur le podium ?

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Publié le 19/05 à 09:24 - Stats Perform

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A l’image de ses 9 victoires consécutives en Ligue 1 Uber Eats, plus longue série en cours parmi les 5 grands championnats, l’AS Monaco affiche un visage plus conquérant sous les ordres de Philippe Clement.

Après avoir passé près de trois-quarts de la saison hors des places européennes, l’AS Monaco est deuxième au classement avant l’ultime journée de Ligue 1 Uber Eats 2021/22 et se retrouve en ballotage favorable pour la qualification en Ligue des Champions. Mais pour cela, le club du Rocher va devoir apporter la touche finale sur la pelouse du RC Lens, samedi. Cette remontée fulgurante au classement est à mettre à l’actif de Philippe Clement. Le technicien belge, qui a pris la relève de Niko Kovac en début d’année, a donné un nouvel élan à une équipe jusque là inconstante. Quels sont les clés de son succès ?

Le printemps est plus doux à Monaco qu’ailleurs dans l’hexagone. Des supporters du club de la Principauté pouvaient déjà imaginer une fin de saison sans enjeu après des éliminations en Coupe de France et en Ligue Europa ainsi qu’un revers sur le terrain du RC Strasbourg le 13 mars (0-1), reléguant l’AS Monaco à la 8e place du classement de Ligue 1 Uber Eats à 6 points du Top 5 et 9 du podium. C’était sans compter sur une série de 9 victoires dans l’élite permettant de se hisser en 2e position du classement, une place que Monaco pourra valider à partir du moment où il fait un meilleur résultat que l’OM qui reçoit Strasbourg. Un beau tour de force de la part de Philippe Clement qui avait connu des débuts timides en Principauté (12 points pris lors de ses 9 premiers matches). Malgré ces tâtonnements, le technicien qui reste sur 3 titres en Jupiler Pro League (1 avec Genk, 2 avec le Club Bruges) a trouvé la bonne formule pour relancer l’ASM. Elle se compose de 3 éléments majeurs : pragmatisme, projection et stabilité.

Moins d’efforts vains

Si le Monaco de Niko Kovac avait l’habitude de jouer haut sur le terrain, il se retrouvait régulièrement coincé dans une phase de possession stérile. Il s’agissait de la formation qui débutait ses séquences dans le jeu le plus haut sur le terrain en moyenne (44m), mais cette domination peinait à se traduire en occasions. Ainsi, l’AS Monaco n’effectuait qu’un tir tous les 67 ballons touchés lors de la 1re moitié de saison de Ligue 1 Uber Eats, plus que toute autre équipe tandis que ce ratio a chuté à 49 en 2022.

Même constat pour le pressing exercé par les joueurs du Rocher, aventureux mais rarement payant avec seulement 0.4 tir à la suite d’une récupération haute par match, pire moyenne sur la première partie de saison, alors que c’est l’ASM qui affiche la meilleure moyenne en la matière depuis l’arrivée de l’entraîneur belge (1.9).

Le Monaco de la phase aller était alors coincé dans un jeu où il détenait le ballon sans réellement l’exploiter, à l’image des rencontres face au RC Lens (3e journée – 0-2) ou le Stade Brestois 29 (12e journée – 0-2). Rencontres lors desquelles il a accumulé plus de deux tiers de possession sans pour autant dépasser les 0.5 Expected Goal (soit le nombre de buts qu’il aurait dû inscrire selon la qualité des tirs tentés). L’AS Monaco se veut plus pragmatique sous Philippe Clement, quitte à être moins démonstrative. 8 des 12 succès du club en 2022 sont intervenus malgré une possession de balle inférieure à 50%, les 4 autres victoires l’ont été contre des équipes de bas de tableau (Clermont, Metz, Troyes, Brest) rarement disposées à conserver la balle.

Le paradoxe est que le club princier a plus souvent marqué sur des séquences dans le jeu de 10 passes ou plus sous son entraîneur actuel que lors de la 1re moitié de saison avec Niko Kovac (4 contre 2), alors qu’il en effectue moins en moyenne (7.9 contre 13.6).

Plus de jeu direct et de solutions sur les côtés

En 2022, Monaco a gommé ses défauts entrevus sur la phase aller. Avec Philippe Clement sur son banc, le club de la Principauté est désormais l’équipe qui tente le plus d’attaques directes (45 séquences dans le jeu débutant dans sa moitié de terrain et s’achevant par un tir ou un ballon dans la surface adverse). L’ASM parvient aisément à atteindre la surface adversaire d’ailleurs avec 530 ballons touchés dans cette zone, soit 4.5% de son total de ballons touchés, c’est plus que toute autre équipe.

Cette capacité à rapidement se projeter dans le camp adverse doit beaucoup aux efforts fournis par les latéraux monégasques cette année. Sous les ordres de Philippe Clement, l’ASM a renoncé à son 3-4-3 hybride pour revenir à un schéma plus conventionnel en 4-2-3-1 au sein duquel Caio Henrique et Ruben Aguilar ont davantage de repères. En 2022, le gaucher brésilien (197) et le droitier français (171) sont les 2 défenseurs qui ont réussi le plus de passes vers les 30 derniers mètres en Ligue 1 Uber Eats. Pour aller avec ses 8 passes décisives, le joueur recruté à l’Atlético de Madrid est impliqué dans 67 séquences dans le jeu ayant abouti à un tir (dont 10 buts), seul son capitaine Wissam Ben Yedder fait mieux avec l’AS Monaco cette année (68).

L’influence des latéraux peut être illustrée par l’ouverture du score monégasque contre l’AS Saint-Etienne le 23 avril dernier par Wissam Ben Yedder. Caio Henrique est au départ de l’action avec Aleksandr Golovin à 30 mètres des cages d’Alexander Nübel. La présence des 2 joueurs sur le côté gauche va perturber la défense stéphanoise qui va suivre les courses intérieures du milieu russe pendant que le latéral gauche profite de la largeur laissée pour faire l’appel et se retrouver en position de centrer aux abords de la surface. Dans le même temps, Vanderson, placé à droite de la défense, temporise avec le ballon et reste en couverture.

Une défense solidifiée

L’autre point fort de l’actuel 2e au classement est la qualité de sa défense. L’AS Monaco partage le meilleur bilan de l’année 2022 avec le Strasbourg Alsace en la matière, n’encaissant que 15 buts, soit 8 de moins que sur la phase aller. Pourtant, les Monégasques concèdent plus de tirs que sous Niko Kovac (11.7 par match contre 9.4) mais ces derniers sont bien moins dangereux car la valeur Expected Goals moyenne des tentatives adverses a chuté de 0.13 xG à 0.10. En d’autres termes, le club de la Principauté a choisi de subir davantage mais à des conditions où elle résiste mieux à la pression adverse.

Ces ajustements défensifs ont fait du bien à Alexander Nübel. Le gardien allemand, prêté par le Bayern Munich, a « évité » 3.9 buts à son équipe en 2022 selon les Expected Goals on target (modèle connexe aux Expected Goals qui ne concerne que la qualité des tirs cadrés), seul Walter Benitez fait mieux (4.1). Il affiche également 78% de tirs arrêtés dans l’élite cette année, c’est 13 points de plus que sur la 1re partie de saison.

Philippe Clement a donc trouvé la formule gagnante pour atteindre un podium qui était quasi inespéré il y a encore deux mois. D’ailleurs, le technicien belge essaye clairement de profiter de cette dynamique jusqu’au bout de la saison, limitant ses ajustements au strict minimum. Cette année, seul Bruno Genesio (1.76) effectue en moyenne moins de changement dans son onze de départ que le coach monégasque (1.88). Cette stabilité a été bénéfique au club du Rocher dans ce sprint final, jusqu’au point de signer une 10e victoire de rang ? Il s’agirait alors de la 3e équipe à finir une saison avec une telle série après Bordeaux en 2009 et… Monaco en 2017.