Stéphane Jobard (Dijon)
Interview

Stéphane Jobard : «Angers et Reims sont des jolies sources d’inspiration»

Stéphane Jobard : «Angers et Reims sont des jolies sources d’inspiration»

Interview
Publié le 29/01 à 12:00 - NM

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Passé de l’ombre à la lumière, Stéphane Jobard est l’entraîneur principal du Dijon FCO depuis l’été dernier. L’ancien adjoint de Rudi Garcia à l’OM se livre sur ses premiers pas, sa gestion d’un groupe et son approche du métier d’entraîneur.

Victorieux face au Paris Saint-Germain, Lille ou encore Rennes, le Dijon FCO surprend depuis le début de saison à domicile, malgré des difficultés loin de ses bases. L’occasion de se pencher sur le profil de Stéphane Jobard, passé d’entraîneur adjoint à entraîneur principal l’été dernier, avant la réception du Stade Brestois 29, samedi, dans un match ô combien important dans la lutte pour le maintien en Ligue 1 Conforama.

Comment jugez-vous vos premiers pas à la tête d’une équipe professionnelle ? 
On va dire que je suis content d’avoir redressé la barre malgré des débuts difficiles, puisqu’au départ, l’équipe n’a récolté que deux points en sept matchs. Forcément, quand on débute dans le métier, les résultats d’emblée donnent du crédit… Mais ce qui est plutôt sympa, c’est d’avoir réussi à se relever et d’être à la lutte avec les autres équipes pour le maintien en Ligue 1 Conforama.

Quel a été le rôle du Dijon FCO dans votre apprentissage du métier ?
Dijon est le club qui a cru en mes compétences. Les dirigeants m’ont confié différentes équipes au sein du club : les jeunes, l’équipe réserve puis ils m’ont intégré dans le staff professionnel d’Olivier Dall’Oglio (2016). Donc c’était une maturation lente et progressive qui m’a permis d’appréhender toutes les facettes du métier.

Ensuite, vous avez rejoint le staff de Rudi Garcia à l’OM en 2018, quel a été l’impact de cette expérience ?
Je me suis rendu compte que lorsque les objectifs sont plus élevés, il y a une autre forme de management. Il y a une matière première avec des joueurs de grande qualité donc le mode de fonctionnement est différent. C’est ce qui m’a marqué à Marseille. Concernant Rudi Garcia, j’étais son capitaine à Dijon et il a cru en mon potentiel. Il m’a incité à m’essayer à l’exercice d’entraîneur, ce qui m’a tout de suite plu. Je me suis dit qu’il y avait peut-être des choses intéressantes à vivre auprès d’un groupe de joueurs.

« La première équipe que doit gérer un entraîneur, c’est son staff »

Vous êtes passé d’adjoint à entraîneur principal, comment avez-vous adapté votre relation avec les joueurs ? 
Déjà, il y a une perception des joueurs qui est différente. En étant numéro un, je suis celui qui décide, alors que lorsqu’on est adjoint, on essaye de maintenir du lien, d’avoir une forme de proximité avec les joueurs pour obtenir des informations et les rassurer. Maintenant, je le fais toujours mais de manière plus épisodique. Mon idée, malgré tout, en tant qu’entraîneur principal est de garder ce contact avec l’ensemble des joueurs. J’aime bien l’échange pour mettre en place un management participatif. Il faut solliciter les joueurs, que ce soit par petit comité ou individuellement, pour avoir leurs impressions et leur ressenti. Il est important de s’enquérir d’informations. Après, ce qui change beaucoup, c’est que je dois montrer de l’intérêt à tous. Je suis très vigilant sur ce point. Il faut aussi que je fasse attention à bien missionner mon staff. Le groupe doit entendre plusieurs voix, pas seulement la mienne, pour qu’on reste dynamique et entraînant pour l’effectif. La première équipe que doit gérer un entraîneur, c’est son staff.

En observant vos premiers pas et les derniers matchs de votre équipe, on a l’impression que votre capacité d’adaptation est l’un de vos points forts. Vous confirmez ? 
Il est vrai qu’on n’a pas été épargné par les faits de jeu sur nos matchs. Après, c’est surtout l’équipe qui a beaucoup de ressources mentales et qui est capable de s’adapter à des situations difficiles. Je pense qu’on a construit cet état d’esprit à travers les premiers matchs de championnat. On était dans le dur puis on a été capable de relever la tête. Notre caractère s’est forgé à ce moment-là et désormais, on s’appuie dessus pour essayer d’exister en Ligue 1 Conforama. 

Gérer les temps de jeu et les égos, est-ce aussi difficile que cela en a l’air ?
Les temps de jeu, je vais être amené à les gérer maintenant parce que l’équipe va enchaîner les matchs. Mais l’idée est de mettre l’équipe la plus performante lors de chaque journée. Après, pour gérer les égos, il faut surtout faire comprendre à chacun qu’il faut être dans une dynamique d’entraînement et de progression. L’idée est de trouver des axes de travail pour amener une plus-value à l’équipe. Cela fait partie du job à part entière, je ne le conçois pas comme une difficulté.

Vous avez beaucoup de jeunes dans votre effectif. Diriez-vous que la nouvelle génération est difficile à manager ? 
Non, elle n’est pas plus difficile. Aujourd’hui, être hyper directif comme par le passé, ça ne marche plus. Il faut savoir donner du sens à nos démarches. Il faut constamment expliquer pour réussir à impliquer les jeunes joueurs. C’est une génération qui est connectée, qui fonctionne beaucoup par les écrans, je crois au pouvoir des images avec eux. L’utilisation de la vidéo est importante à mes yeux.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans ce métier ? 
L’adhésion des joueurs à un projet, les voir impliqués au quotidien, c’est vraiment gratifiant de voir que les joueurs croient à ce que vous proposez. A partir de là, ils donnent le meilleur d’eux-mêmes et font le maximum pour atteindre les objectifs. Après, je sais que les résultats passent forcément par une dynamique de groupe intéressante. S’il n’y a pas de lien entre les joueurs, c’est difficile de les faire adhérer au projet. Créer cet amalgame est quelque chose de motivant. Je suis très vigilant sur la composition des groupes pour les matchs, et même de mon effectif en général. Ça restera mon leitmotiv pour l’année prochaine.

« Quand on parle de sources d’inspiration, ce n'est pas seulement dans l’univers du football »

Est-ce qu’il y a des équipes qui vous inspirent particulièrement ?
Quand on est Dijon, on regarde les équipes qui fonctionnent avec des moyens similaires, et dans les mêmes eaux que nous. Angers SCO et le Stade de Reims sont des équipes qui sont apparues également récemment en Ligue 1 Conforama et qui progressent sans cesse. Ce sont des jolies sources d’inspiration au même titre que leurs entraîneurs. Quand je vois Stéphan Moulin depuis des années à Angers, qui a fait grandir la structure et qui fait passer des paliers chaque année à son équipe, c’est un bel exemple. Comme David Guion qui a battu des records en Domino’s Ligue 2, qui a fait monter le Stade de Reims en Ligue 1 Conforama et qui propose aujourd’hui une qualité de jeu intéressante. Une structure comme la nôtre doit tendre vers ce type de modèle. On sait qu’avec notre budget, on n’aura jamais de stars. Par contre, trouver des joueurs qui veulent grandir chez nous, c’est un vrai projet pour l’avenir. 

Vous avez également été professeur d’EPS, vous regardez sûrement d’autres sports ? 
Effectivement, là, le tournoi des Six Nations va bientôt commencer, j’aime bien regarder le rugby. Dernièrement, j'ai regardé du biathlon, sinon le handball, je trouve ça très télégénique. Je regarde un peu tous les sports.

Cela a-t-il un impact sur ce que vous tentez parfois de mettre en place avec votre équipe ?
On a la chance à Dijon d’avoir beaucoup d’équipes de haut niveau. On a un club de basket en Pro A, un club de rugby en Fédérale 1. Avec les différents entraîneurs, on s’est rencontrés dernièrement, on a échangé sur notre management avec les caractéristiques de chacune des activités. C’était très intéressant. Je vais accueillir prochainement l’entraîneur de rugby dans nos locaux, qui va assister à un entraînement, pour qu’on se nourrisse l’un et l’autre de nos méthodes. Au rugby, ce qui m’impressionne, c’est la gestion de 45 joueurs. Au niveau du basket, la répétition des matchs tous les deux-trois jours. Quand on parle de sources d’inspiration, on essaye de regarder un peu ce qu’il se passe à droite, à gauche, et pas seulement dans l’univers du football.

Revenons à la Ligue 1 Conforama, votre équipe est invaincue à Gaston-Gérard depuis le 24 août mais vous êtes en difficulté à l’extérieur. Comment l’expliquez-vous ?
Mes joueurs s’étaient fixé un challenge d’être embêtants à jouer à domicile. On est en train de le relever parce qu’on sait que ce sont nos prestations à domicile qui nous permettent, pour le moment, de nous maintenir. A l’extérieur, je trouve mes joueurs timorés et sur la retenue. L’objectif de cette deuxième partie de saison est de desserrer le frein à main pour prendre davantage d’initiatives. Cela se joue surtout au niveau mental, il va falloir qu’on fasse tomber cette barrière. 

Justement, comment tentez-vous de libérer vos joueurs ?
Avec le staff, on essaye de sensibiliser les cadres de l’équipe, de les inviter à tenter, puisque de toute façon, on obtient peu de résultats à l’extérieur. Il faut vraiment que l'on puisse retrouver en déplacement le jeu qu’on porte rapidement vers l’avant à domicile. L’idée, c’est de leur dire qu’on ne pourra pas faire pire : allez-y, osez, tentez. Il faut qu’on fasse preuve d’audace.