Boris Diaw
Interview

Boris Diaw : «Avec mes grands bras, on me mettait aux cages»

Boris Diaw : «Avec mes grands bras, on me mettait aux cages»

Interview
Publié le 19/11 à 09:53 - ADS

Partager

Parrain des Journées nationales de l’arbitrage 2020, l’ex-basketteur international français Boris Diaw et supporter des Girondins de Bordeaux évoque son rapport au football. De son passé de gardien à ses meilleurs souvenirs de stades en passant par sa rencontre avec Didier Drogba et les liens entre foot et NBA.

Boris Diaw, pouvez-vous nous parler de votre rapport au football ?
Comme tout le monde, j’ai joué au foot enfant. J’ai pratiqué plein de sports différents en club puisque j’ai fait du rugby, du judo, de l’escrime, du hand, du volley, de l’athlé, mais jamais de foot. Mais à l’école, on jouait tout le temps au foot : pendant la récréation, le midi… J’étais plutôt gardien car j’avais de grands segments. Avec mes grands bras, on me mettait aux cages ! Ça me plaisait bien même si j’ai fini par demander à l’école d’installer un panier de basket !

« Les Girondins ? Une histoire de famille »

Pour venir en foot, est-ce que vous supportez un club en particulier ?
J’ai grandi à Bordeaux donc je supporte les Girondins. C’est une histoire de famille, d’entourage, puisque mes potes étaient pour Bordeaux, mon grand frère est supporter des Girondins depuis toujours… Il y a aussi ce côté chauvin qui donne envie de supporter sa ville. Les Girondins ont fait partie de ma jeunesse et j’ai continué à les suivre ensuite, pas forcément assidument mais je vais au stade de temps en temps. J’ai commencé à y aller dans les années 90. C’était à Chaban-Delmas avec Lizarazu, Zizou… Et aujourd’hui, quand je rentre à Bordeaux et qu’il y a un match, j’essaie d’aller au Matmut ATLANTIQUE. Le dernier match que j’ai vu, c’était un match nul contre Nice fin septembre (0-0). J’avais pu croiser Jaroslav Plasil, qui est désormais dans le staff et qui fait partie de mes connaissances car il est très pote avec un de mes meilleurs amis. Il y a quelques années, j’avais aussi donné le coup d’envoi d’un Bordeaux-PSG.

Avez-vous eu l’occasion d’aller voir des matchs ailleurs qu’à Bordeaux ?
J’ai assisté à des rencontres un peu partout. Tout dépend d’où je suis ! Il y a encore quelques mois, lorsque j’étais à Paris, je suis allé au Parc des Princes voir le PSG. A l’occasion d’une tournée organisée par la NBA en Italie, j’avais vu un match de l’AC Milan. J’ai aussi fait Barcelone et un derby madrilène. Dur de ne pas citer la finale de la Coupe du monde 2006 à Berlin, le France-Italie avec le coup de tête de Zidane. Ça reste, forcément. On y était allé avec Tony Parker et d’autres. Et en 2010, Thierry Henry m’avait invité avec Ronny Turiaf pour le fameux France-Mexique (match marqué par une altercation entre Raymond Domenech et Nicolas Anelka) mais je n’ai pas entendu ce qui s’est dit dans le vestiaire, j’étais en tribune et il y avait les vuvuzelas (rires).

Et aux Etats-Unis ?
J’ai vu du foot féminin à Salt Lake City et j’ai assisté à plusieurs rencontres de MLS, à Portland notamment. L’ambiance était top, à l’américaine : c’était le feu mais très familial en même temps. L’équipe de Portland, c’est les Timbers, les bûcherons en français. Ce qui est marrant, c’est qu’à chaque but, un mec avec une énorme tronçonneuse découpe une bûche pour la donner au joueur qui vient de marquer (rires). J’attendais de voir ça et je n’ai pas été déçu ! Ça me fait penser à un épisode du début de ma carrière en Grèce. J’avais joué dans une ambiance très chaude avec Pau-Orthez contre l’AEK Athènes je crois. On jouait juste après un match de foot et tous les ultras avaient débarqué pour la deuxième mi-temps !

« J’aimais beaucoup Thierry Henry »

A quel rythme suivez-vous l’actualité foot ?
J’ai toujours un peu suivi les Girondins même si je préfère regarder les matchs au stade qu’à la télé. Je suis surtout les équipes de France, quel que soit le sport. Dès qu’il y a une grande compétition, je regarde. D’ailleurs, mon souvenir de foot le plus marquant, c’est la Coupe du monde 98. Je me souviens où j’étais pour chaque match. Pour le quart, j’étais chez des amis. Pour la demie, j’étais en camp de basket avec l’équipe de France jeunes, on avait regardé le match tous ensemble. Pareil pour la finale.

Quels sont les joueurs qui vous ont le plus marqué ?
J’aimais beaucoup Thierry Henry. Il représentait la fougue, la jeunesse… J’aimais bien son duo avec David Trezeguet. Chez les Girondins, je vais forcément citer Zizou, c’est simple (rires). Généralement, je suis plus sensible aux milieux de terrain, peut-être parce que c’est un poste où il faut faire jouer les autres, où on attaque et on défend… C’est un poste qui demande d’être complet et il y a sans doute un parallèle avec le style de joueur que j’étais. Parmi les joueurs actuels, je ne vais pas tomber dans les clichés donc je vais dire Blaise Matuidi et Presnel Kimpembe. On a même eu l’occasion de travailler ensemble sur le média Bros Stories.

Vous avez également eu l’occasion de croiser Didier Drogba…
Comme Thierry Henry, que je croise de temps en temps parce que c’est un super pote de Tony Parker, Didier Drogba est fan de NBA. Au milieu des années 2000, on avait échangé nos maillots via une connaissance commune. Je lui avais filé un de mes maillots de Phoenix, signé, et lui m’avait envoyé un maillot de la Côte d’Ivoire. Et en janvier dernier, comme je suis réserviste dans la marine nationale, j’ai eu l’occasion d’aller rendre visite aux militaires français basés en Côte d’Ivoire. Didier Drogba était sur place pour s’occuper de projets humanitaires avec son association. On s’était rencontré à l’occasion de l’inauguration d’un terrain dans un quartier sensible. C’était super sympa de le voir dans cette deuxième carrière dans laquelle il fait des choses superbes. C’est une légende là-bas, il faut voir son impact sur la population. Il aurait pu se présenter aux élections (rires) !

« Sans protège-tibias, ça devient compliqué avec certains ! »

Il y a des fans de foot en NBA ?
Le plus grand fan de foot, c’est Steve Nash, avec qui j’ai joué à Phoenix et qui a été double MVP. Il est Canadien mais son père est anglais et c’est un grand fan de Tottenham. Après sa carrière, il a même investi dans le club de Majorque, en deuxième division espagnole, avec le propriétaire des Phoenix Suns. Et ces dernières années, il commentait même les matchs du championnat anglais pour la chaîne américaine qui diffuse la Premier League mais là, il va devoir arrêter puisqu’il devient le coach des Brooklyn Nets. Je me souviens aussi d’un concours de dunks du All Star Game où il avait envoyé la balle au pivot Amare Stoudemire en faisant une roulette puis en faisant des jongles et une tête. Steve Nash se débrouillait vraiment super bien balle au pied. Il aurait peut-être pu tenter une carrière dans le foot. Parmi les autres joueurs de NBA, je peux aussi citer Bismack Biyombo, mon ex-coéquipier à Charlotte, ou Joël Embiid. Comme beaucoup d’Africains, ils sont fans de foot et ont joué étant jeunes.

Et chez les Frenchies ?
Ronny Turiaf est un gros fan de l’OM. Il va régulièrement à l’Orange Vélodrome, il peut faire l’aller-retour pour voir un match. C’est un fana de l’OM. C’est marrant parce qu’en équipe de France, il y avait un peu de tout. Nicolas Batum aime bien le PSG, Tony Parker aussi même si maintenant, c’est l’OL. Nando De Colo est pour le RC Lens, Alexis Ajinça est de Saint-Etienne…

Est-ce qu’il vous est arrivé de taper la balle avec vos coéquipiers durant votre carrière ?
A Pau, avec Claude Bergeaud et Fred Sarre, il pouvait nous arriver de prendre un ballon et d’aller jouer dehors pour décompresser. En équipe de France, on jouait un peu au début mais il y a eu de plus en plus de problèmes avec les assurances. Quand on joue sans protège-tibias, ça devient compliqué avec certains (rires). Et puis, c’est con de se blesser en jouant au foot pendant une grosse compétition ! Ceux qui sortaient du lot ? Il y avait Mamoutou Diarra, Florent Piétrus, qui jouait derrière à la Desailly, Ronny Turiaf, qui jouait plutôt attaquant, et Tony Parker aussi…

« Sans arbitre, il n’y a pas de match »

Pour en venir aux Journées nationales de l’Arbitrage 2020, comment êtes-vous devenu parrain de l’opération ?
L’idée est de faire passer certaines valeurs, à travers le rapport avec les arbitres que j’ai pu avoir lorsque j’étais joueur. On est en contact avec les arbitres durant toute notre carrière et ils sont partie intégrante du jeu. Le problème est que l’on oppose parfois joueurs et arbitres alors qu’il ne faut pas, on joue contre des adversaires et les arbitres sont neutres. J’aimerais faire passer le message aux jeunes que les arbitres sont essentiels. Sans arbitre, il n’y a pas de match. Il faut savoir les respecter et les comprendre. C’est également une passion pour eux. Les arbitres choisissent de se mettre au service des autres, à travers ce qui est une mission de service public, d’intérêt général… Des valeurs qui sont importantes pour moi.

Lorsque vous étiez sur les parquets, quel style d’arbitres appréciez-vous ?
J’aimais les arbitres avec qui l’on pouvait discuter. Ça dépend des tempéraments. Certains arbitres aiment s’ouvrir, prendre le temps pour expliquer leurs décisions, discuter avec les joueurs même si ce n’est pas toujours possible dans le feu de l’action. En tant que joueur, c’est plus simple de se retrouver face à un arbitre qui communique plutôt que face à un mur. J’aimais bien ce type d’arbitres. Que le coup de sifflet soit pour ou contre toi, ça se passe généralement bien quand tu as une explication.

Avez-vous senti que l’on vous arbitrait différemment plus votre carrière avançait ?
Pas vraiment. En NBA, pas trop, mais peut-être davantage en équipe de France. J’étais peut-être un peu plus « respecté » sur la fin de ma carrière. J’ai joué une quinzaine d’années en NBA et, avec le nombre de matchs disputés, on côtoie les arbitres tellement souvent qu’on finit par se connaître mieux. C’est alors plus simple de communiquer et il peut y avoir une petite évolution mais je ne pense pas en avoir bénéficié pour obtenir davantage de fautes. Et ça peut être à double tranchant. On dit parfois que certains joueurs connus sont protégés mais, justement, les arbitres ne veulent pas être accusés de les avantager, ce qui peut se retourner contre les joueurs en question. Mais je n’ai pas senti ça à mon égard.