Interview

Raí : « J’ai tiré un pénalty sous les sifflets du Parc »

Raí : « J’ai tiré un pénalty sous les sifflets du Parc »

Interview
Publié le 15/05 à 08:50

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Symbole du PSG dans les années 90, le capitaine Raí a plongé dans ses souvenirs de cinq saisons parisiennes en Ligue 1 Uber Eats. Un entretien lors duquel il est question de Leonardo, Yannick Noah, mais aussi de finesse technique et d’un fameux pénalty contre Monaco...

L’histoire a retenu que votre compatriote Valdo (n°10 du PSG avant lui) a joué un rôle important dans votre venue au PSG. Est-ce vrai ?
Valdo, je l’ai connu à l’âge de 17 ans dans le championnat des jeunes au Brésil. Lui jouait au Grêmio et moi à Botafogo. Après ça, nous nous sommes retrouvés en équipe nationale. C’est là qu’il m’a parlé du PSG. Je trouvais qu’il avait de la chance de pouvoir jouer au foot tout en habitant à Paris ! Un an plus tard, Michel Denisot a consulté Ricardo Gomes et lui pour savoir s’il devait me recruter ou non.

Connaissiez-vous déjà la ville de Paris ?
Avant de signer au PSG, je n’y étais passé qu’une seule fois. Mais cette ville me faisait rêver ! Et pour moi qui faisais des études d’histoire, la France m’intéressait tout spécialement. Je ne connaissais pas beaucoup le club car, à l’époque, on ne voyait pas d'images du championnat de France au Brésil.

Au-delà de l’attrait de la ville, quels ont été les arguments sportifs pour favoriser votre venue en 1993 ?
A 28 ans, j’avais envie de quitter le Brésil. Valdo et Ricardo m’ont donné envie de venir au PSG, même si j’avais aussi des offres d’Italie. Mais je trouvais que le projet était différent avec l’ambition de devenir un grand d’Europe. Et le PSG est venu me voir au bon moment, car c’était la fin de la saison au Brésil (fin décembre 1992). Je me suis rapidement mis d’accord avec les dirigeants mais São Paulo voulait que je reste quelques mois de plus afin de disputer la Copa Libertadores, que l’on a d’ailleurs remportée.

« A Paris, j’ai découvert la neige et les terrains gras »

En effet, vous n’avez rejoint le PSG que six mois après l'officialisation, au moment de l’été...
Ces six mois m’ont permis de préparer mon arrivée au PSG. Malgré cela et le titre de champion, la première année a été difficile car j’étais très fatigué... C’était la première fois que je quittais mon pays. Je devais me faire à une autre culture, construire mon nouveau cadre de vie.

Quels sont vos premiers souvenirs de la découverte de la France ?
La première chose dont je me souviens à mon arrivée, c’est mon coup de foudre pour la ville ! Et ensuite, ce désir de conquête aussi bien sportive que personnelle. Et puis, au bout de deux mois, j’ai découvert la neige et les terrains gras de l’hiver… Et croyez-moi, cette année-là, le mois de novembre avait été très rude ! Cela avait été très difficile, d’autant plus que j’étais revenu un peu tard du Brésil, où j’avais joué en août et en septembre des matchs de qualification pour le Mondial 94.

Que gardez-vous de vos premiers matchs ?
Les deux premiers matchs s’étaient très bien passés. J’avais fait une ouverture en coup du foulard pour David Ginola avant de marquer le but de la victoire de la tête (1-0 contre Montpellier). Sur mon deuxième match (4-0 contre l’AJA), j’avais failli marquer avec un petit lob qui avait fini sur le poteau. Je me souviens du coach Artur Jorge qui était venu me voir dans le vestiaire pour me dire : « Quel but tu as failli marquer ! ». Mais après ça, j’ai commencé à manquer de jus…

Avez-vous un autre souvenir marquant de cette première saison ?
Le match au Parc contre Monaco (1-1, avril 1994), un moment déterminant dans ma carrière au PSG. C’était le printemps, je commençais à me sentir mieux. Il y avait un problème avec les supporters qui, pour manifester leur mécontentement, ont commencé à nous siffler. Et il y a eu un pénalty en notre faveur. Ce pénalty a été le plus tendu de ma carrière. Devant les 40 000 spectateurs, j’ai alors pris le ballon - à l’époque, je n’étais pas encore le tireur attitré – et je l’ai transformé sous les sifflets…C’était un moment charnière. Une fois dans le vestiaire, Ricardo m’a dit que j’avais joué ma carte séjour sur ce pénalty ! Si je l’avais raté, ça aurait été vraiment difficile pour moi.

Le pénalty faisait partie de vos spécialités. Quel était votre secret ?
Je dirais les millièmes de secondes avant la frappe où il faut avoir la tête froide pour être capable de changer de décision, en cas de besoin. Je choisissais mon côté avant mais, en fonction des indications du gardien, je pouvais changer au dernier moment. C’est le plus difficile à faire. Si le gardien ne bougeait pas, je la plaçais généralement croisée sur sa droite.

 

« Yannick Noah a une lumière incroyable ! »

Quels sont vos meilleurs souvenirs de vos cinq saisons au PSG ?
Il y a forcément la Coupe des Coupes en 1996 avec la fête qu’il y a eue derrière, le public, les Champs-Elysées... Puis, mon dernier match au Parc, contre Monaco (25 avril 1998). Il y a aussi eu le moment symbolique où j’ai pris le brassard de capitaine (saison 96/97), le but contre le Barça au Parc (1/4 de finale retour de Ligue des Champions, 94/95), le 5-0 contre Bucarest où il y avait une ambiance... Il y a aussi le match retour contre Parme avec mes deux pénaltys (3-1, 1/4 de finale retour de Coupe des Coupes, 95/96).

Vous évoquez le titre européen de 1996. Pouvez-vous nous parler du rôle de Yannick Noah auprès du groupe avant la finale contre le Rapid de Vienne ?
Pour remporter une grande victoire, tous les détails sont importants. Donc Yannick Noah a apporté sa contribution. Ça serait trop de dire que le PSG n’aurait pas gagné la Coupe sans lui mais il a été important. C’était une très bonne idée de l’intégrer au groupe. Je ne le connaissais pas avant ça, mais c’est un mec qui a une lumière incroyable. Il a une énergie positive qui vous marque immédiatement. Un peu comme un Maradona ou un Cantona.

« Mon geste préféré ? Le petit pont, pour la réaction des spectateurs »

Quel a été votre plus beau but avec le maillot parisien ?
Un qui était difficile à mettre, c’est un but que je mets avec un piqué à Metz (0-3, 95/96). L’enchaînement avait été très réussi.

Et quel a été le match le plus abouti lors de votre période au club ?
Un 5-0 contre le FC Nantes qui était tenant du titre (1995/96). Je dirais que c’est le match où nous avons été au top techniquement. J’avais mis un but sur un petit lob, tout comme Youri Djorkaeff.

Parlons technique justement. Quel était votre geste préféré ?
Le petit pont. Pour la réaction des spectateurs et l’impact sur l’adversaire. Et aussi les tirs en finesse. Cela a toujours été ma marque de fabrique, ce qui contrastait avec mon côté athlétique (il mesure 1,89 m). Mon frère musicien a fait une composition où il parle justement de ça. Et Leonardo me disait : « Tu fais la même chose que d’autres, mais en plus beau ».

Quels souvenirs avez-vous de Leonardo, qui a passé un an à vos côtés au PSG (1996/97) ?
Leonardo, c’est moi qui l’ai convaincu de venir au PSG. Nous étions déjà très proches à São Paulo. Il était parti en Espagne et au Japon mais il voulait revenir en Europe. Six mois avant, j’ai fait la démarche d’en parler à Michel Denisot et à Ricardo (le coach). C’était une superbe opportunité pour le club, d’autant plus qu’il arrivait libre. Il aurait pu faire une grande carrière au PSG mais à l’époque, le club ne pouvait pas le retenir quand il est parti au Milan...

Enfin, qui a été votre coéquipier préféré lors de vos cinq saisons en Ligue 1 Uber Eats ?
Ricardo Gomes est l’homme que j’admire le plus. Lors de ma première convocation avec le Brésil, nous étions dans la même chambre. On a donc vécu de grands moments ensemble. Il a été très important dans ma carrière. Il a été capitaine de l’équipe nationale avant moi. Comme joueur, il a subi plusieurs blessures qui lui ont fait manquer la Coupe du Monde 1994 mais, malgré cela, il s’est toujours dépassé pour revenir. C’était un exemple de force mentale. Quand il est devenu mon entraîneur (1996), c’était bizarre. Je n’étais pas très à l’aise, car nous étions tellement proches. Je ne savais pas quelle distance garder entre nous.