Philipp Köhn (AS Monaco).
Interview

Philipp Köhn : « Quand tu es gardien, il faut être fort dans la tête »

Philipp Köhn : « Quand tu es gardien, il faut être fort dans la tête »

Interview
Publié le 24/08 à 10:57 - NM

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Recruté cet été par l’AS Monaco en provenance du Red Bull Salzbourg, le jeune portier Philipp Köhn (25 ans) évoque son parcours, ses inspirations, ses axes de progression ainsi que la sélection suisse. Entretien.

Philipp, avez-vous toujours joué au poste de gardien ?
J’ai commencé à aller dans les buts très jeune, à l’âge de 5-6 ans. Quand on commence à jouer, on joue un peu partout sur le terrain mais il manquait un gardien un jour et je me suis proposé. Depuis ce match, je n’ai pas bougé des cages !

Pouvez-vous nous raconter votre parcours ?
Je suis né et j’ai grandi en Allemagne, où je suis passé par différents clubs durant ma jeunesse : Duisbourg, Schalke 04, Stuttgart, Leipzig… Ça m’a permis de voir différentes choses, notamment des méthodes d’entraînement différentes. J’ai ensuite débuté ma carrière professionnelle en Autriche, au FC Liefering, puis au Red Bull Salzbourg. J’ai aussi fait une saison en prêt au FC Wil, en D2 suisse, une très bonne expérience pour moi car, en tant que jeune gardien, j’avais besoin de temps de jeu pour me développer.

Et ensuite ?
Quand je suis revenu à Salzbourg (2021/22), j’étais d’abord numéro 2 mais quand le coach (Matthias Jaissle) a fait appel à moi, j’ai répondu présent et il m’a maintenu sa confiance. Le RB Salzbourg est un excellent tremplin car c’est le meilleur club du championnat d’Autriche et là-bas, tu as aussi l’occasion de jouer la Ligue des champions ou la Ligue Europa.

Qu’avez-vous appris lors des nombreux matchs européens que vous avez disputés ?
À gérer une nouvelle exigence en termes de concentration. Il y avait une grosse différence entre le championnat autrichien et la Ligue des champions, où on affrontait les meilleures équipes d’Europe. En Ligue des champions, il faut rester concentré pendant 90 minutes parce qu’à chaque seconde, il peut se passer quelque chose. Mais c’est très stimulant de se retrouver contre les meilleurs joueurs du monde. C’est pour ça qu’il faut tout faire pour que l’AS Monaco se qualifie pour cette compétition.

Comment vous définiriez-vous comme gardien ?
Je suis un gardien qui lit bien le jeu, capable de faire des arrêts et de jouer au pied. J’ai un certain nombre de qualités et vu ce que le coach Adi Hütter souhaite, je pense que je serai beaucoup amené à m’appuyer sur mon jeu au pied.

« J’observais beaucoup Gianluigi Buffon et Iker Casillas »

On parle souvent de l’école des gardiens allemands. Pouvez-vous nous en parler ?
Je ne sais pas si l’on peut dire qu’il y a un style allemand. C’est surtout Manuel Neuer qui a énormément fait évoluer le poste de gardien, et ce dans le monde entier, pas seulement en Allemagne. Tous les gardiens s’inspirent de lui. Son style est un peu spécial parfois mais il réussit toujours à être excellent. Le poste de gardien est sans doute celui qui a le plus évolué sur ces 20 dernières années.

À part Manuel Neuer, il y a d’autres gardiens que vous appréciez ?
J’ai essayé de m’inspirer de beaucoup de gardiens différents. Il y a quelques années, j’observais beaucoup Gianluigi Buffon et Iker Casillas, en plus de Manuel Neuer. J’aime aussi beaucoup Jan Oblak et Hugo Lloris, qui a une morphologie assez proche de la mienne. Hugo est un gardien de classe mondiale avec des réflexes impressionnants, qui va vite au sol.

Quels types d’arrêts affectionnez-vous particulièrement ?
Plus que l’arrêt en lui-même, c’est le côté décisif qui compte pour moi. Donc le plus bel arrêt à faire, je dirais que c’est celui qui te permet de préserver la victoire et le clean sheet, à la dernière minute d’un match !

Dans quels domaines pensez-vous avoir une marge de progression ?
Partout ! Mais peut-être encore plus au niveau de la personnalité. C’est toujours difficile d’arriver dans un nouveau championnat, une nouvelle ville. J’ai envie de m’adapter au plus vite. Heureusement, j’ai ma petite amie avec moi, ma famille et même mon chien ! Le groupe m’a aussi très bien accueilli donc tout est réuni pour que ça marche !

Pour revenir à l’aspect mental et à la grande capacité de concentration que demande le rôle de gardien, comment gérez-vous cela en tant que jeune joueur ?
C’est sûr que c’est un poste où il faut être concentré tout le temps, jusqu’à la 90e minute. Comme je le disais plus tôt, il faut parfois faire un arrêt à la dernière minute pour permettre à l’équipe de gagner donc la concentration est primordiale. Avec Salzbourg, j’ai vécu des rencontres très différentes parce qu’en championnat, on était la meilleure équipe du pays, alors qu’en Ligue des champions, il fallait évidemment un niveau de concentration bien supérieur.

« Travailler l’aspect mental est une bonne chose »

Comment travaille-t-on cela ?
C’est difficile car les entraînements et les matchs sont très différents mais ici, avec Frederic de Boever, il y a des méthodes nouvelles pour moi, avec beaucoup de cardio, car si le corps est en forme, les idées seront plus claires. Travailler l’aspect mental est une bonne chose mais il faut pouvoir connecter ces exercices avec ce qu’il se passe sur le terrain. Ce n’est pas facile mais c’est obligatoire, quand tu es gardien, il faut être fort dans la tête.

Pouvez-vous nous parler d’Adi Hütter ?
Je connaissais bien sa philosophie de jeu parce qu’il est passé par le RB Salzburg lui aussi. Je voyais aussi ses matchs avec l’Eintracht Francfort et le Borussia Mönchengladbach. Avant de signer ici, on a discuté au téléphone mais je savais déjà que c’est un coach qui aime avoir le ballon, qui demande de presser.

Vous êtes international suisse alors que vous jouiez pour l’équipe d’Allemagne jusqu’en U18. Qu’est-ce qui vous a poussé à faire ce choix ?
C’était naturel de représenter l’Allemagne chez les jeunes car c’est le pays où je suis né et où j’avais toujours vécu. Mais ensuite, comme ma mère est de Lausanne, j’ai été contacté par la fédération suisse. Le courant est tout de suite passé avec les coachs et les entraîneurs des gardiens. Je ne jouais pas en équipe première à Stuttgart mais le staff suisse a choisi de me faire confiance. J’ai donc commencé à représenter la Nati à 18 ans et j’ai eu la chance de jouer avec les U19, les U20 et les Espoirs.

Vous avez aussi été appelé chez les A, où vous avez côtoyé Yann Sommer, Jonas Omlin et Gregor Köbel durant la dernière Coupe du monde…
C’est marrant parce que Yann et moi, on a eu le même entraîneur des gardiens. Chez les jeunes à Stuttgart, j’avais eu celui qui était son coach à Mönchengladbach (Steffen Krebs). On en a beaucoup discuté. Mais oui, c’est sûr qu’il y a beaucoup à apprendre de gardiens comme Yann, Jonas ou Gregor. Pas tant au niveau technique, car chacun a son propre style, mais davantage au niveau mental, dans la manière d’approcher les matchs ou même les entraînements.

Vous n’êtes pas le seul gardien suisse de Ligue 1 Uber Eats puisqu’il y a aussi Yvon Mvogo au FC Lorient. De quoi vous lancer dans un petit duel pour savoir qui sera le meilleur portier suisse du championnat ?
Ce sera peut-être un duel pour les médias mais pas pour moi (rires). En plus, je connais bien Yvon puisque nous avons été ensemble à Leipzig pendant un an. C’est un bon gars. Mais je vais me concentrer sur mes performances et si on est bons tous les deux, c’est au sélectionneur que ça posera peut-être un problème !