Interview

Daler Kuziaev : « Les plats de ma maman me manquent »

Daler Kuziaev : « Les plats de ma maman me manquent »

Interview
Publié le 30/08 à 09:28 - Arnaud Di Stasio

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Pilier de l’équipe de Russie, Daler Kuziaev explique pourquoi il a quitté le Zénith pour le Havre AC. Son adaptation, le rôle de Mathieu Bodmer, Dejan Lovren… Entretien.

Après six ans au Zénith, un club qui t’a permis de t’installer en équipe de Russie, comment as-tu choisi de rejoindre le Havre AC ?
J’ai choisi le HAC pour de nombreuses raisons. Déjà, je voulais évoluer dans un grand championnat et la Ligue 1 Uber Eats est très compétitive. Ensuite, les dirigeants havrais m’ont fait comprendre qu’ils désiraient ardemment ma venue. J’ai vu que c’était un club très bien structuré, professionnel à tous les points de vue. Et lorsque mon père et moi avons discuté avec le HAC, on a été impressionnés par la précision du discours, leur connaissance de mon jeu... On a tout de suite adhéré au projet.

Quel a été le rôle de Mathieu Bodmer dans votre signature ?
Il a eu un rôle central lors de mes discussions avec le club. Mathieu est une très bonne personne. Il a été un grand joueur et aujourd’hui, il réussit très bien dans ses nouvelles fonctions de directeur sportif puisqu’il a réussi à faire remonter le HAC en Ligue 1 Uber Eats.

« Je voulais aller voir plus haut »

Le HAC a l’un des effectifs les plus jeunes du championnat. Un profil plus expérimenté comme le tien est d’autant plus précieux…
Oui, c’est sûr qu’il y a beaucoup de jeunes dans le groupe. Les dirigeants et le staff cherchaient à amener un peu plus d’expérience et c’était probablement une raison de plus pour me recruter. Mais quand on a discuté, il a surtout été question de là où j’allais jouer sur le terrain, de ce qu’on attendait de moi dans le jeu… Ce n’est pas parce que j’ai davantage d’expérience que certains de mes coéquipiers que j’ai obtenu des garanties, ça ne fonctionne comme ça dans aucun club. Il faudra prouver sur le terrain, en match comme à l’entraînement.

Tu es l’un des meilleurs joueurs russes et, comme évoqué plus tôt, tu as un certain pedigree avec près de 50 sélections en équipe nationale, un gros palmarès avec le Zénith… Que réponds-tu à ceux qui sont surpris de te voir aujourd’hui au Havre ?
Je sais que beaucoup de gens ont été surpris de me voir quitter le Zénith pour Le Havre mais j’ai aussi reçu énormément de retours positifs. Beaucoup de gens ont compris ma décision. Ils savent que j’ai passé presque 10 ans dans le championnat russe et que j’avais besoin d’un nouveau challenge. Je voulais aller voir plus haut et découvrir un nouveau pays, une nouvelle culture… Autant de raisons qui font que je suis très heureux au Havre aujourd’hui.

Ça faisait longtemps que tu pensais à quitter la Russie pour découvrir un nouveau championnat ?
Il y a trois ans déjà, j’avais beaucoup réfléchi à partir dans l’un des cinq grands championnats. Ça ne sort pas de nulle part. J’ai pris le temps de peser le pour et le contre, de réfléchir à si je devais partir de mon pays ou non et dans quel championnat signer. Ça n’a pas été un processus facile pour ma famille et moi car je sortais de six saisons fantastiques au Zénith et que j’étais en très bons termes avec tout le monde. Mais on est arrivés à la conclusion que c’était le moment de voir autre chose et cette opportunité de signer en France est arrivée… Je voulais vraiment jouer dans un championnat du top 5 et tout le monde connaît la renommée du foot français. Les Bleus ont gagné la Coupe du monde 2018 et ils sont allés en finale en 2022, ça en dit long !

« Ma qualité principale ? Je travaille dur ! »

En Russie, quelle image a-t-on du championnat français ?
Les Russes connaissent bien la Ligue 1 Uber Eats et ils savent que c’est un championnat très dur physiquement. D’ailleurs, j’ai pu le vérifier dès mon premier entraînement ici ! Il y a beaucoup de joueurs costauds et même les plus jeunes sont prêts physiquement. Mais c’est bien, c’est l’école parfaite pour moi, ça va m’aider à m’adapter plus rapidement. Pour revenir à l’image du championnat français, les Russes le suivent encore davantage depuis l’arrivée d’Aleksandr Golovin à Monaco. Ses matchs sont régulièrement diffusés, comme ceux du PSG bien sûr. Mon coach au Zénith, Sergueï Semak, a d’ailleurs joué à Paris. Quand j’ai évoqué avec lui l’opportunité de signer ici, il ne m’a dit que du bien de son expérience en France.

Pour ceux qui ne t’auraient pas encore vu jouer, peux-tu décrire ton style ?
Je suis milieu axial, plutôt box to box, mais je suis capable de jouer partout. Je crois que j’ai déjà évolué à tous les postes sauf gardien ! Ma qualité principale, c’est que je travaille dur. J’ai aussi un gros mental je pense. Sur le terrain, je me bats à chaque instant. Mes statistiques ? C’est vrai que j’ai eu la chance de marquer pas mal de buts la saison dernière (5 en 26 matchs de D1 russe).

À quoi ressemblerait une saison réussie pour le HAC ?
Le club est de retour en Ligue 1 Uber Eats après de nombreuses saisons à l’échelon inférieur donc il faudra tout d’abord se maintenir. On va travailler très dur pour ça et si on peut finir dans le top 10, ce serait super. On a des jeunes et des joueurs d’expérience donc j’espère que c’est le bon mélange pour atteindre nos objectifs.

« J’ai des cours de français trois ou quatre fois par semaine »

Comment se déroule ton adaptation en France ?
Très bien. J’apprends la langue mais ce n’est pas la plus facile (rires) ! Je parlais un peu espagnol mais le français, c’est encore un autre niveau. Pour apprendre la langue, je me sers d’une application mais j’ai surtout des cours avec un professeur trois ou quatre fois par semaine. Je veux vraiment apprendre le français au plus vite car la plupart des joueurs de l’équipe parlent français. Si je veux m’adapter au plus vite, ça passe par là. Pour l’instant, j’échange en anglais, notamment avec le coach, ou avec les quelques mots de français que je connais mais ce n’est pas encore assez pour avoir une vraie conversation.

Et pour le reste ?
Le club m’a beaucoup aidé dans mon installation donc tout se passe pour le mieux et, chaque jour, je me sens un peu mieux en France. Mais je dois avouer que les bons petits plats russes me manquent ! La cuisine française est très réputée mais, en Russie, c’est peut-être un peu plus sain. Tout du moins, c’est la cuisine à laquelle je suis le plus habitué. Les plats de ma maman me manquent, surtout ceux à base de blé noir ! J’en mangeais tous les jours en Russie.

Quelles sont les principales différences entre la vie en Russie et la vie ici, en France ?
Sur mes premières semaines ici, j’ai l’impression que toutes les démarches administratives sont bien plus compliquées. Pour acheter une carte SIM, une voiture ou bien ouvrir un compte en banque, il faut parfois fournir un justificatif de domicile ou des fiches de paie. C’est plus simple en Russie.

« On m’arrêtait souvent dans la rue pour me remercier »

Tu es international russe depuis 2017 et tu as notamment eu la chance de disputer un Mondial à la maison en 2018…
C’était fantastique… Plus le temps passe et plus je réalise la chance que j’ai eue. On a réalisé une super Coupe du monde et on a rendu fiers les Russes. Ça a été une grande fête dans tout le pays. On a bien joué et on a même failli atteindre les demi-finales mais on a malheureusement perdu aux tirs au but en quarts de finale (2-2, 4-3 aux tab pour la Croatie). Ça restera un moment inoubliable. D’ailleurs, après le Mondial, on m’arrêtait souvent dans la rue pour me remercier pour le parcours de l’équipe de Russie. C’était vraiment fantastique et l’un des meilleurs souvenirs de ma carrière pour sûr.

Tu as parfois été capitaine de l’équipe de Russie ces derniers mois. Est-ce que tu penses pouvoir rapidement un leader au HAC malgré la barrière de la langue évoquée plus tôt ?
Avant tout, je veux prouver que je peux être performant dans un championnat comme la Ligue 1 Uber Eats. Ensuite, c’est sûr que je vais essayer d’apporter mon expérience et d’aider au mieux les jeunes. Il y a beaucoup de joueurs talentueux au HAC. J’espère pouvoir leur montrer qu’ils doivent continuer à travailler dur, qu’ils doivent être patients, et s’ils y arrivent, on mettra toutes les chances de notre côté pour être une équipe forte.

Tu as beaucoup parlé de ton père, qui a lui-même été joueur professionnel…
(Il coupe) Oui, et ce n’est pas tout ! Mon grand-père paternel, qui vient du Tadjikistan, était également footballeur de haut niveau. Mon père l’a imité avant de devenir entraîneur, le meilleur que j’ai connu bien sûr (sourire). Il est désormais directeur sportif. Mon frère a également été footballeur professionnel. Il avait beaucoup de talent mais plusieurs blessures l’ont empêché d’exploiter son potentiel à 100%. Et si j’ai des enfants un jour, j’espère qu’ils perpétueront cette tradition ! Un des fils de mon frère, le plus grand, montre déjà beaucoup de qualités. Je crois que c’est dans notre sang !

« Dejan Lovren nous faisait bien rire »

Avec le Zénith, tu as affronté l’OL en Champions League et Bordeaux en Europa League. Il te reste des souvenirs de ces matchs ?
Je me rappelle bien du match contre Bordeaux à Saint-Pétersbourg car j’avais marqué ! On avait gagné en plus (2-1 en octobre 2018). Au retour, on avait fait match nul là-bas mais on avait eu de la chance car ils nous avaient largement dominés. Contre Bordeaux comme face à l’OL, j’avais été marqué par la force physique des joueurs. Ils étaient aussi très au point tactiquement. De toute façon, en coupe d’Europe, on affronte la crème. Ce sont les matchs les plus intenses à vivre.

Au Zénith, tu as eu pour coéquipiers plusieurs joueurs que l’on connaît bien en France comme Leandro Paredes, Malcolm ou encore Dejan Lovren…
Je m’entendais très bien avec Dejan. On est toujours en contact tous les deux d’ailleurs et il m’a souhaité la bienvenue en France. C’est quelqu’un de positif, très drôle, mais je ne peux pas vous raconter toutes les anecdotes ! Ce que je peux vous dire, c’est qu’il nous faisait bien rire avec son accent croate !