Interview

Frau : « Les anciens de l’OL voulaient attraper Ben Arfa »

Frau : « Les anciens de l’OL voulaient attraper Ben Arfa »

Interview
Publié le 15/04 à 11:56

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Champion de France avec l’OL et le LOSC, Pierre-Alain Frau évoque ses grandes années ainsi que la Ligue 1 actuelle, de Ben Arfa à Tudor en passant par Hazard. Entretien.

Formé à Sochaux, où il s’est révélé au début des années 2000, Pierre-Alain Frau a ensuite porté les couleurs de l’Olympique Lyonnais, du RC Lens, du PSG ou encore du LOSC. L’occasion d’ajouter quelques lignes supplémentaires à son palmarès. Entraîneur des U19 et directeur du centre de formation depuis janvier au FC Sochaux-Montbéliard, « PAF » compte 84 buts dans l’élite et un certain nombre de souvenirs qu’il a évoqués dans l’émission Ligue 1 Legends sur la chaîne Twitch de la Ligue 1 Uber Eats.

Que pensez-vous de l’évolution de la Ligue 1 Uber Eats ces dernières années ?
L’arrivée du Qatar à Paris a changé énormément de choses avec une attractivité qui permet d’attirer de grands joueurs internationaux, ce qui n’était pas le cas à mon époque. L’état des pelouses s’est aussi beaucoup amélioré. Il y a quelques années, c’était différent avec parfois des champs de patates sur lesquels il était difficile de s’en sortir techniquement ! Les résultats de l’équipe de France ont aussi permis aux joueurs locaux de prendre confiance. Et, par-dessus tout ça, la Ligue 1 Uber Eats continue à lancer beaucoup de jeunes. Un phénomène qui s’est encore amplifié ces dernières.

« Il n’y avait même plus de cri de guerre dans le vestiaire »

Pour revenir sur votre carrière de joueur, vous avez évolué à différents postes de l’attaque. Quelle était votre préférence ?
Chez les jeunes, je jouais toujours côté droit. Jean Fernandez m’a replacé dans l’axe à son arrivée à Sochaux. Ça me plaisait bien et je me suis approprié le poste. J’aimais bien pouvoir faire des courses différentes car, sur l’aile, soit on court le long de la ligne, soit on rentre un peu dans le jeu. Il y a plus de variété dans l’axe. Maintenant, c’est sûr que je n’avais pas le gabarit pour me débrouiller seul dans l’axe. J’étais mieux avec du monde autour de moi. Mais finalement, j’ai joué un peu partout devant et ça ne me posait pas de souci de passer d’un poste à un autre.

Après Sochaux, vous avez porté les couleurs de l’OL à l’époque où le club enchaînait les titres de champion. Qu’est-ce qui vous a marqué là-bas ?
La mentalité ! Il n’y avait que des gros compétiteurs qui avaient banalisé le fait de gagner. Après les victoires, il n’y avait même plus de cri de guerre dans le vestiaire. C’était normal de gagner, c’était devenu une culture. Et au niveau individuel, il y avait des joueurs impressionnants, notamment au milieu avec les Essien, Diarra, Juninho… Derrière, il y avait Cris, Abidal… Mais plus que les individualités, c’est donc la mentalité qui s’était installée au fil des saisons qui faisait la différence. Ce besoin de gagner transpirait. J’arrivais de Sochaux où c’était forcément un peu moins le cas car même si on avait de bons résultats, on savait qu’on allait aussi perdre des matchs. A Lyon, il ne fallait pas perdre !

Qu’est-il arrivé à cette culture de la gagne ?
Quand tu gagnes moins, c’est que cette culture a disparu, forcément. Il y a beaucoup plus de jeunes joueurs dans l’effectif, il y a Paris qui prend tout sur son passage… L’OL se cherche peut-être un peu car le club veut miser sur la formation tout en voulant disputer la Ligue des champions. C’est plus dur de se positionner qu’à l’époque où j’y étais et où le club gagnait tout.

« Je n’aimais pas jouer contre Éric Abidal »

Quel est votre meilleur souvenir à Lyon ?
Peut-être mon premier match de Ligue des champions ! Je quittais Sochaux, où j’avais tout vécu puisque je suis né là-bas, et tu te retrouves dans un club avec de grandes ambitions, à jouer contre Manchester United à Gerland… C’était une équipe que j’admirais enfant, avec les Beckham, Giggs… Se retrouver face à ces maillots rouges, c’était quelque chose… Et j’ai eu la chance de marquer ! J’ai pas mal de bons souvenirs dans ma carrière puisque j’ai eu la chance d’être champion de France plusieurs fois, de gagner une Coupe de la Ligue, de faire remonter Sochaux, mon club formateur, en Ligue 1…

Pendant votre carrière, vous avez joué contre des clubs comme Manchester United, l’Inter, Liverpool, le Borussia Dortmund… Où avez-vous connu la meilleure ambiance ?
Fenerbahçe ! J’ai eu la chance d’y jouer deux fois et, en Turquie, l’ambiance était incroyable. On ne s’entend pas parler sur le terrain et quand ça siffle, c’est tellement intense que ça fait mal aux oreilles ! Et lorsque tu joues dans des stades mythiques comme Anfield ou Old Trafford, tu ne peux t’empêcher d’avoir un regard de gamin même si tu es joueur professionnel depuis un moment déjà ! Les matchs de Coupe d’Europe, c’est toujours différent et c’est vrai que j’ai eu la chance d’en faire dans des stades sympas !

Quel défenseur vous a posé le plus de problèmes ?
Éric Abidal ! J’ai eu la chance de jouer avec lui mais, avant ça, je n’aimais pas jouer contre lui car, comme j’étais rapide, je préférais me retrouver contre des défenseurs plus lents que moi. Éric allait aussi vite que moi donc ça me déstabilisait un peu. J’étais content d’apprendre qu’il signait à Lyon le même été que moi. C’était mieux de se le coltiner à l’entraînement qu’en match !

« Hatem Ben Arfa met trois mecs sur les fesses »

Et le joueur le plus impressionnant ?
J’ai eu la chance de voir démarrer trois phénomènes : Hatem Ben Arfa, Karim Benzema et Eden Hazard. Hatem était certainement le plus gros talent que j’ai vu même s’il n’a pas fait la carrière qu’il aurait dû faire. Karim débutait à l’OL quand j’y étais et on a aussi tout de suite vu qu’il allait être phénoménal. Ça transpirait. J’ai ensuite vu Eden Hazard débuter à Lille. Ce sont des joueurs qui ont un truc en plus. En un ou deux entraînements, tu vois qu’ils ne sont pas comme les autres. Souvent, les premières impressions te permettent de déceler un potentiel.

Comment ça s’est traduit avec Hatem Ben Arfa justement ?
Lors de mon deuxième entraînement avec l’OL, à la reprise, on finit par un jeu et Hatem met trois mecs sur les fesses. On parle d’Edmilson et de deux autres internationaux qui venaient d’être champions de France plusieurs fois. Tout ça avec une facilité… Les anciens voulaient l’attraper à la fin de la séance (rires). Il avait vraiment un talent exceptionnel ! C’est dommage qu’Hatem n’ait pas fait mieux. Il a fait une belle carrière mais il aurait pu faire tellement plus. Il avait les qualités pour remporter le Ballon d’or un jour. Malheureusement, le talent ne suffit pas toujours.

Vous évoquiez Lille et Eden Hazard plus tôt. Qu’est-ce qui a fait la différence lors de la saison du titre de champion de France remporté en 2011 avec Rudi Garcia ?
Déjà, une super ambiance s’était créée. Il y avait un bon équilibre entre jeunes et anciens. Comme partout, il y avait quelques petits groupes mais avec une grande tolérance entre tous. On prenait du plaisir à se retrouver tous les jours. Sur la seconde partie de saison, on s’est pris au jeu car on était devant. On avait la chance de ne pas avoir sur notre route une équipe comme l’OL des années 2000 ou le PSG actuel. Lors de mes années lyonnaises, gagner le titre, c’était faire le job. A Lille, c’était plus tendu. C’était encore plus fort à vivre, notamment car c’était le premier titre de beaucoup de joueurs. C’est un titre qui nous a soudés puisqu’on est encore beaucoup à être en relation. Et quand on y repense, offensivement, il y avait du beau monde : Gervinho, Hazard, Sow, Obraniak, De Melo… On arrivait à bien combiner devant et derrière, c’était fort aussi. Avec Mickaël Landreau, on avait un gardien qui nous rapportait des points. Tout était aligné pour que ça se passe bien !